la Constitutionnelle a la parole

la Constitutionnelle a la parole

La douzième journée de mobilisations contre la réforme des retraites en France s’est tenue avec moins d’affluence et le regard est braqué sur le Conseil constitutionnel qui rendra ce vendredi publique sa décision sur la mesure qui consiste à relever l’âge de la retraite de 62 à 64 ans. De retour des Pays-Bas, le président Emmanuel Macron a opté pour cette réforme qui a remué la majorité des Français. Comme dans d’autres appels, il y a eu de violents affrontements entre policiers et émeutiers à Paris, Lyon et Bordeaux. Un policier a été blessé à la tête dans la capitale.

L’entrée du siège constitutionnel s’est levée symboliquement bloquée par des restes d’ordures. Dès six heures de l’après-midi, toute manifestation dans ses environs est interdite. Tôt le matin, des grévistes ont envahi le siège de la marque de luxe LVMH, propriété de Benard Anault, l’homme le plus riche du monde.

Le leader de la Gauche insoumise, Jean-Luc Mélenchon, a propagé sur son compte Twitter un message avec une photo d’un grand cordon policier devant la Constitutionnelle. « La barricade a-t-elle changé de camp ? », s’interroge Mélenchon, qui ajoute que l’image « illustre le passage d’une crise sociale à une crise démocratique ».

Les syndicats soutiennent que quelle que soit la décision de la Cour constitutionnelle, ils continueront dans la rue, mais nul doute que si la loi est enfin laissée libre cours et que le risque d’essoufflement de la contestation est grand.

Quelque 400 000 personnes se sont rassemblées à Paris, selon la CGT, et 42 000, selon la police. dans toute la France, les syndicats estiment qu’un million de personnes sont descendues dans la rue ; ce serait 380 000, selon la police. Le 6 avril, ils étaient 57 000 dans la capitale, et 570 000 dans tout le pays, selon le ministère de l’Intérieur.

Les options des « neuf sages »

Les neuf sages du Conseil constitutionnel, emmenés par l’ancien Premier ministre Laurent Fabius, doivent se prononcer sur la constitutionnalité de la réforme, à la demande de la Première ministre, Élizabeth Borne. Ils peuvent considérer qu’elle est totalement contraire à la Constitution, partiellement contraire, conforme ou partiellement conforme.

S’ils maintiennent l’essence de la mesure, même s’ils introduisent quelques modifications mineures, celle-ci sera promulguée. Macron remporterait une victoire, même si cela ne convaincrait pas les détracteurs. 62% des Français rejettent la mesure.

La Cour constitutionnelle, dont fait partie le conservateur Alain Juppé, doit également se prononcer sur l’opportunité d’organiser un référendum, comme l’a réclamé la gauche. Les syndicats s’accrocheraient à cette option pour exiger que la promulgation soit retardée.

Fabien Roussel, secrétaire national du Parti communiste, a déclaré que le soi-disant référendum d’initiative partagée serait « la meilleure option pour tous ». Selon lui, ce serait « la meilleure sortie de crise ».

Le troisième scénario serait le pire pour Macron : l’invalidation de la réforme. Dans ce cas, le président subirait un coup sévère, puisqu’il a misé son capital politique avec cette mesure, qu’il juge indispensable pour éviter un nouvel endettement dû au vieillissement de la population.

Macron, qui a été réélu à la présidence en avril 2022 face à Marine Le Pen, verrait son principal pari échouer. Son mandat ne se termine qu’en 2027, mais son parti, Renacimiento, et ses alliés ne disposent pas de la majorité à l’Assemblée nationale. Pour cette raison, il était sur le point de perdre l’une des motions sur la réforme : il est allé de l’avant avec neuf voix. Le gouvernement avait approuvé cette initiative controversée en recourant à l’article 49.3, qui permet qu’il n’y ait pas de vote à l’Assemblée législative.

Le président Macron s’est montré disposé à discuter avec les représentants des syndicats, une fois la décision constitutionnelle connue. Elle compte promulguer la loi et entamer une nouvelle étape de plus grande ouverture.

Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a affirmé ce jeudi que le combat syndical contre la réforme des retraites est « loin d’être terminé ». Il envisage de reprendre les manifestations le 1er mai, fête du Travail.

La nouvelle dirigeante de la CGT, Sophie Binet, a affirmé que le président Macron « ne pourra pas gouverner le pays tant qu’il n’aura pas retiré cette réforme ». Concernant une rencontre avec Macron, il a insisté sur le fait que « si l’ordre du jour est de savoir comment retirer la réforme, nous irons. Mais si c’est « Je joue et puis je me rencontre, alors ce ne sera pas possible ».

La distance entre Macron et les citoyens semble plus grande que jamais, même s’il a traversé des moments difficiles avant la pandémie avec la crise du gilets jaunes. Selon le sondage Ifop, seuls 18% des Français estiment que Macron comprend leurs inquiétudes. Pourtant, 58% voient Marine Le Pen, leader du Regroupement national, proche de leurs intérêts. La différence est frappante.

Il est possible que, malgré le combat syndical et de gauche, celle qui rend cette crise électoralement profitable soit Marine Le Pen, qui dispose désormais d’une force parlementaire forte, la première de l’opposition avec 89 députés. Le Pen s’oppose à la réforme des retraites et envisage de l’abattre s’il parvient à l’Elysée en 2027. Il reste une vie.

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